L’obsession des supporters pour les actions directes de buts

On le sait, pour gagner un match de football, il est impératif de marquer des buts. Souvent perçus comme des héros, les joueurs offensifs sont donc mis en lumière pour le caractère décisif de leurs contributions. Plutôt injustement d’ailleurs, puisque le plus important reste d’être solide défensivement derrière (mieux vaut le point du match nul qu’une défaite).

Mais qu’importe, les supporters de foot prennent donc primairement le nombre de buts marqués afin de comparer leurs joueurs fétiches. Toujours est-il que cette seule statistique ne parvenait pas à illustrer l’impact offensif de la plupart des acteurs sur la pelouse, puisque les buts sont rares et souvent quasi exclusifs à certains au sein des différents effectifs. Une autre statistique dite “objective” a donc fait progressivement son apparition : la passe décisive, celle précédant le but.

Très démocratisée par l’avènement de monstres du sport comme Messi, cette statistique s’est imposée dans le monde du ballon rond comme l’un des piliers du mode comparatif, bien que peu pertinente et profondément injuste.

En effet, cette passe n’est en rien décisive parce qu’elle doit être impérativement jugée en fonction de son contexte. Cette passe peut-être extrêmement anodine ou être créatrice de danger, sans que l’on en sache rien.

Faire une passe au milieu du terrain à un joueur qui va dribbler la défense adverse et marquer après une course de trente mètres ou créer une magnifique occasion à son buteur qui n’aura plus qu’à pousser le ballon dans des cages vides sera comptabilisé de la même manière. On s’accordera donc tous à dire que ce n’est pas une statistique individuelle pertinente, puisqu’elle ne dit rien sur le contexte qui la précède.

Un joueur avec au moins dix à quinze passes à la fin de la saison est soit un créateur de haut niveau, soit un joueur entouré de finisseurs hors pairs, soit (le plus souvent) un mix des deux.

Une statistique plus pertinente commence enfin doucement, mais sûrement, à se frayer un chemin dans les esprits des supporters : la grosse occasion créée.

La saison dernière en Ligue des champions par exemple, Jude Bellingham a délivré 5 passes décisives pour 7 grosses occasions créées, ce qui est un bon ratio. Kylian Mbappé n’a en revanche délivré aucune passe décisive à ses coéquipiers bien qu’il ait créé 9 grosses occasions. Le premier était donc épaulé par des bons butteurs alors que le second était entouré de joueurs ayants des difficultés à finir ses propres occasions. On ne sait même pas lesquelles des grosses occasions de Bellingham ont été concrétisées et lesquelles font suites à des passes plus anodines…

Bref, cette statistique ne fonctionne pas et ne devrait pas être mise en lumière pour juger la créativité, le danger et la qualité des passes d’un joueur dans le football moderne.

Le bon réflexe serait donc plutôt de prendre en considération les passes décisives attendues (xA) ainsi que les grosses occasions de buts pour juger et comparer l’impact offensif des joueurs de foot, puis de prendre dans un second temps une multitude d’autres statistiques afin d’affiner le tout par la suite.


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